Le processus de création 

Lorsqu’une idée me vient, je la dessine ou la note dans un carnet, ou je prends une photo que je conserve dans mon e-pad. Parfois je prends juste de la terre entre mes mains et je laisse faire…

Je travaille avec deux terres qui n’ont pas les mêmes particularités. La couleur bien-sûr, mais surtout la chamotte. C’est un grain plus ou moins gros que contient la terre. Plus il est fin, plus la sculpture sera lisse et permet de travailler le détail. Par contre, sa construction est plus fragile, elle ne « tient pas debout » lorsqu’elle est encore humide et ne permet pas de créer de grandes pièces sans un support intérieur, qu’il faut pouvoir ensuite retirer.


Le Raku 

La pluspart de mes sculptures ont été émaillées avec la technique dite du Raku. Il s’agit d’une méthode ancestrale japonaise utilisée pour la création des bols dédiés à la cérémonie du thé. 
Après le façonnage et le ponçage, les pièces en terre sont d’abord sêchées à l’air pendant environ 2 semaines. Ensuite elles subissent une première cuisson dans un four électrique, qui permet de monter doucement à la température de 900 degrés en 12 heures.


La pose de l’émail a précédé d’au moins 24 heures la 2ème cuisson, qui a lieu dans un four à gaz. La fusion de l’émail se fait à 950 degrés, après environ 50 minutes. Une fois la température atteinte, le couvercle du four est promptement retiré. Les sculptures subissent alors un choc thermique au contact de l’air et l’émail se craquelle. Chaque pièce est ensuite déposée dans une cuve en métal contenant de la sciure et du papier, qui s’enflamment au contact de la sculpture brûlante. Un couvercle est alors déposé sur la cuve pour éteindre les flammes et produire de la fumée. Cette fumée va se déposer sur toutes les parties non couvertes par l’émail, dont les craquelures. Après 30 minutes d’enfumage, les sculptures vont encore subir un dernier « outrage » en étant plongées dans une bassine remplie d’eau, alors qu’elles sont encore très chaudes; se dégage alors des bulles et de la vapeur. Si la sculpture a survécu à toutes les manipulations et n’a pas encore éclaté dans les 3 enfournements précédents, elle peut encore exploser au contact de l’eau, ce qui arrive malheureusement trop souvent…
Après un brossage consciencieux de la sculpture, qui permet d’enlever le voile noir du à l’enfumage et les brindilles, je peux constater le résultat de 5 à 6 semaines de processus. 

Les différentes étapes 

Tant que la terre n’est pas cuite, elle peut être réduite à l’état de poussière. La première étape comprend l’élévation de la pièce et son modelage. Le taux d’humidité de la terre permet de sculpter, mais pas de fignoler. Il faut laisser sêcher la pièce à différents stades, pour pouvoir gratter, puis poncer, jusqu’à la forme finale. Parfois c’est trop tôt et souvent c’est trop tard..

La terre, si fragile 

Le sculpteur doit pouvoir faire face à la frustration. Il ne passe pas une journée sans que qu’une de mes statues ne perde un bras, une jambe ou la tête, parfois les trois…
Plus la pièce sêche, plus elle est fragile et cassante. Les plusieurs étapes de ponçage sont particulièrement délicates. Certains endroits sont difficiles à atteindre et il suffit d’une simple pression sur un membre, lors de la manipulation, pour retrouver un personnage emputé. Il passe ensuite par la clinique. Parfois la greffe prend. Dans le cas contraire, la pièce est perdue et retournera à la terre…
Après le première cuisson que l’on appelle « le biscuit », toute l’humidité a disparu de la terre. Elle est alors plus solide, mais les membres restent fragile. Chaque manipulation demande beaucoup de précautions.